Intitulé «Œil géologue. Dégager la chair du mort terrain», cet essai auto-fictionnel explore mon histoire familiale en se concentrant sur les aspects humains de l’activité minière, en Abitibi-Témiscamingue, où mon père a grandi, et dans l’arrière-pays de la Côte-Nord, où il a agi comme prospecteur au début des années 1950.
Continuer la lectureInspirée par sa figure paternelle, j’emprunte aux méthodes d’exploration et de prospection pour dégager des souvenirs et des anecdotes de nos vies respectives, que je replace dans un contexte historique. Mon texte se développe sous forme de fragments, comme autant de carottes de sondage miniers autour de moments et de lieux choisis, dont se dégagent en filigrane un vécu et un imaginaire. Ma démarche repose sur une quête familiale, mais elle me permet aussi d’explorer des questions de société qui se posent aujourd’hui de façon aigüe dans le contexte de recherche d’alternatives aux énergies fossiles.
L’ensemble s’articulera en trois parties. Une première, intitulée «Île d’innocence», regroupe mes souvenirs d’enfance et de jeunesse. Elle se concentre sur l’intimité et la complicité partagées avec mon père. Elle décrit aussi le contexte historique et témoigne de la relative ignorance – par les centres financiers, d’expertise ou de consommation – des difficultés qu’engendre l’activité minière pour celles et ceux touché.e.s par sa nébuleuse. Centrée sur l’Abitibi, appelée Kitakinan par les Anichinabés, la deuxième partie s’articule sur des anecdotes de jeunesse de mon père et son histoire familiale. Elle met en avant l’omnipotence des compagnies sur la communauté de proximité, son organisation sociale, sportive et culturelle, ainsi que sur l’exploitation du territoire. Finalement une partie sur la Côte-Nord, que les Innus nomment Nitassinan, me permet de me pencher sur l’accaparement des terres autochtones au profit de l’exploitation de la ressource minière à partir de témoignages de ceux qui l’ont vécu.
Ce projet de création fait converger mon expérience d’essayiste vers des sujets plus personnels. J’y fait d’ailleurs figure de personnage dans la quête qui m’anime, de même que mes proches et les autres personnes de mon récit. Mon père, mes sœurs et moi dans mon enfance, s’ajoutent mon grand-père, ma grand-mère, leurs amis, mes tantes et mes oncles en Abitibi et mon père et ses collègues, les innus et naskapis de la Côte-Nord : Ann Antane Kapesh, Mathieu Mestepaneu André et Jérome St-Onge.